Conte d'Hivernel : 2025

Conte d'Hivernel : 2025
Asheralia il y a 2 heures dans Divers

Retrouvez le conte merveilleux qui vous a accompagné

tout au long du Calendrier de l'Avent 2025.

 

Comme chaque année le Calendrier de l'Avent Communautaire organisé par notre site, avec l'aide de nombreux lutins, s'accompagne d'un conte à déguster tout le long de l'évènement.

Originellement divisé en 24 parties, vous pouvez à présent le retrouver ci-dessous dans son intégralité et illustré.

 

 

 

Dans une clairière à l’orée d’une forêt tyrienne, le vent d’hiver siffle son chant annonciateur de la rudesse du temps à venir. Les couleurs d’automne ont peu à peu quitté les arbres environnants, les laissant dépouillés de leurs robes flamboyantes. Seul le chaume du toit d’une petite chaumière égaie encore d’une touche de couleur ce tableau. 

Dans cette maison vit un jeune homme, Demyan, avec son père. Ce dernier est absent, la dure réalité de la vie l’emmène loin de son foyer afin de subvenir aux besoins de son sang, plongeant ainsi le fils dans une vie de solitude et d’autonomie.

 

Un matin parmi tant d’autres encore, Demyan s’en va dans la forêt afin de récolter assez de bois pour alimenter le feu de cheminée de la chaumière. Il est assez évident que ces flammes sont à la fois synonymes de confort et de survie dans ce milieu isolé. Les bras encombrés de branches mortes de toutes tailles, Demyan se fige soudainement, laissant tomber au sol son butin matinal. Son regard se porte sur un triste spectacle qui lui serre le cœur. Devant lui gît au sol une pauvre créature inanimée en détresse, une patte coincée entre les mâchoires d’un piège à loup.

 

De crainte de voir des braconniers dans les parages, le jeune homme parcourt du regard les environs. Ne voyant ni n’entendant rien, lui laissant penser une telle présence, ses yeux se reportent à nouveau sur l’animal à terre. Doucement, Demyan s’en approche jusqu’à s’agenouiller à ses côtés. Il s’agit d’un renard à la fourrure blanche, bien que son pelage soit souillé par la boue et son propre sang. D’une main hésitante, le garçon vient toucher ses flancs et se rend compte qu’il est encore en vie en sentant sous ses doigts les faibles tremblements qui émanent du corps fébrile du renard.

Comme une évidence, la décision est rapidement prise dans l’esprit de Demyan qui s’empresse de libérer la pauvre créature du cruel piège à loup. Une fois l’animal délicatement pressé contre lui, il se hâte de regagner sa demeure dans l’espoir de faire son possible pour le sauver.

 

 

Les jours défilent, et la situation n’évolue pas, le renard reste désespérément inconscient. Demyan perd peu à peu espoir malgré ses efforts jusqu’à ce que quelque chose d’inattendu se passe. Une sorte de lueur émane du corps inanimé, une lueur qui se transforme doucement en lumière plus forte, jusqu’à ce que cette dernière devienne aveuglante et se propulse droit vers le garçon qui tombe à la renverse.

 

“— Aide-moi…

Cette voix, Demyan l’entend dans sa tête, et comprend tout de suite qu’elle appartient au renard qui tente de communiquer avec lui.

Le dialogue s’établit alors entre les deux personnages, l’un par la parole et l’autre par la télépathie. Demyan ne peut s’empêcher d’enchaîner les questions.

“— Que s’est-il passé ? Qu’est-ce qu'il t’est arrivé ? Qui es-tu ?

Miho, je m’appelle Miho. Je suis… Je suis l’Hivernel. J’ai besoin de ton aide, une grande menace plane sur Hivernel, il faut l’arrêter avant que ce ne soit trop tard.

Comment ça, tu es l’Hivernel ? Je croyais que Hivernel n’était qu’une fête à la fin de l’année ?

Non, loin de là, laisse-moi t’expliquer ce que c’est réellement. Au commencement, c’était une célébration du passage de l’hiver au printemps, ces deux saisons étant personnifiées par Grenth et Dwayna. Les dieux se battaient alors pour que leur saison l’emporte sur l’autre, Grenth souhaitait que l’hiver perdure le plus longtemps possible tandis que Dwayna souhaitait quant à elle le retour des beaux jours et la renaissance de la nature. Puis les dieux s’en sont allés, coupant toute communication avec les hommes. Peu à peu, cette fête a perdu son côté pieux, se transformant en un festival universel sous le signe de l’entraide, la joie et les cadeaux. Je suis né après le départ des dieux. Je suis né des vagues de chaleur des cœurs des habitants célébrant Hivernel, de la joie apportée et reçue, du bonheur créé en cette période. Mais voilà, le temps a passé, les siècles se sont écoulés, et la ferveur des célébrations s’est estompée, comme la poussière par le vent. Les bonheurs partagés ont peu à peu fait place à de simples échanges matériels, on préfère célébrer les cadeaux plutôt que l’instant, et on préfère célébrer les profits pécuniaires plutôt que ceux du cœur et de l’esprit. Moi qui tirais ma force de leur ferveur, je me suis affaibli, et le pire est arrivé. Des fils de Svanir s’en sont pris à moi, me dérobant mon essence vitale, le cœur d’Hivernel. Cet artefact est si puissant qu’il pourrait entraîner un désastre s’il est entre de mauvaises mains. Il faut de toute urgence le retrouver avant qu’il ne soit trop tard. J’ai besoin de ton aide, Demyan. Aide-moi à sauver Hivernel.

 

 

Voyant la détresse de la situation et avec sa pureté d’âme, Demyan accepte aussitôt d’aider Miho même s’il n’a aucune idée de la façon dont il peut le faire. Ce dernier le rassure et lui dit.

“— Je vois bien que tu ne possèdes pas la force d’un guerrier ni le pouvoir d’un souverain, mais ton cœur sincère est amplement suffisant pour me prouver ta valeur. Bien que cette décision risque de m’affaiblir davantage, je vais partager avec toi l’intégralité de mes pouvoirs, ils ne me sont d’aucune utilité dans l’état dans lequel je suis actuellement de toute façon. Approche-toi.

Avec une certaine lenteur, le renard se redresse et vient connecter son front à celui du jeune garçon. C’est alors que tous deux, les yeux clos, entrent dans une sorte de résonance. Leurs âmes se connectent l’une à l’autre, et la magie de Miho se déverse en Demyan, lui conférant ses capacités. Sans même avoir à poser une seule question au renard, le garçon sait tout de suite ce dont il est à présent capable.

“— Tu dois à tout prix m’aider à retrouver et récupérer le Cœur d’Hivernel, Demyan. Cet artefact va causer un grand malheur s’il ne m’est pas restitué à temps.

Que va-t-il se passer, Miho ? Je le sens bien que tu ne me dis pas tout.

Le renard soupire, et expose ce qu’il sait.

“— Les fils de Svanir m’ayant laissé pour mort dans ces bois avaient pour mission de récupérer mon cœur et de le livrer à leur chef, Vargundr Main-de-Givre. Leur épouvantable dessein risque de bouleverser l’équilibre de ce monde. Ils souhaitent utiliser le Cœur d’Hivernel afin de ramener Jormag à la vie. S’ils parviennent à leurs fins, alors la Tyrie courra un grave danger et les fils de Svanir tenteront d’en prendre le contrôle avec l’aide de leur dragon fraîchement ramené des morts. Dès demain, nous devons nous mettre en route pour les retrouver et les arrêter. Profitons de cette dernière soirée de calme pour nous reposer et regagner des forces, les jours qui viennent s’annoncent sans repos.

 

Au matin suivant, comme prévu, les deux compères s’apprêtent à partir. Demyan est pris de doutes quant à comment ils vont faire pour rattraper les fils de Svanir, mais Miho le rassure une nouvelle fois. Le renard lui montre aussitôt qu’il leur suffit d’utiliser la magie qu’ils partagent en s’élançant dans les airs, comme si des ailes invisibles lui permettaient de s’élever toujours plus haut à chaque bond réalisé. D’un pas hésitant, Demyan s’élance à son tour et prend de la hauteur. Une fois pleins d’assurance, tous deux s’envolent miraculeusement et prestement à travers le ciel. Traversant les brumes et les nuages, les régions défilent à toute vitesse. Très vite, les paysages des Cimefroides s’étendent sous leurs yeux, et c’est dans les terres situées au nord des Congères d’Antreneige qu’ils font enfin halte.

“— Mon cœur est proche, je le sens”, dit Miho.

 

Évoluant discrètement à travers les arbres de cette dense forêt, ils avancent doucement dans la direction donnée par l’animal, jusqu’à découvrir de leurs yeux une terrible nouvelle.

Dans l’immense clairière qui s’étend devant eux, des centaines de fils de Svanir se sont réunis en un gigantesque campement, peut-être même des milliers d'entre eux. Au centre de cette foule rassemblée, une masse colossale prend place : il s’agit ni plus ni moins du corps inanimé de Jormag, recouvert par la neige et la glace. Cette vision pétrifie de peur Demyan. Il ne s’attendait certes pas à une tâche facile, mais il ne pensait pas que l’ennemi à affronter serait si nombreux.

 

 

Miho, de son côté, observe silencieusement la situation. Il remarque avec un léger soulagement que de toute évidence, les fils de Svanir ne sont pas prêts pour ramener le dragon à la vie. Bien qu’ils soient en possession de l’artefact nécessaire, il est évident que les conditions requises au rituel ne sont pas encore tout à fait réunies afin de le débuter, ce qui laisse encore du temps devant eux pour trouver une solution pour les en empêcher.

 

Plus tard, à la nuit tombée, Demyan et Miho s’en sont allés camper dans les bois.

Sous un abri de fortune fait de branches entrelacées, le jeune homme peine à contenir pour lui sa peur. Le regard perdu dans les flammes émanant du maigre feu de camp, Demyan sent son cœur lourd, son esprit n’arrive pas à voir d’issue positive au problème auquel ils doivent faire face. Aucun scénario ne semble aboutir à une fin heureuse. La gorge serrée, il s’efforce à refouler les larmes qui menacent d’inonder son visage.

Quant à Miho, il a du mal à trouver les mots pour rassurer le garçon. Au fond de lui, l’animal au pelage de neige sait que tout est loin d’être perdu, sa sagesse immémoriale lui permet de garder le sang-froid et les idées claires. Malgré tout, il n’arrive pas à partager son optimisme à Demyan qui finit par s’endormir dans un sommeil empli d’images cauchemardesques.

 

Les semaines se sont écoulées, peut-être même des mois complets, et la Tyrie se retrouve plongée dans un chaos fait de neige et de glace. Les fils de Svanir sont partout, la domination des serviteurs de Jormag et du dragon est presque absolue. La population tyrienne s’est muée en une sorte de masse incohérente d’êtres mi-vivants mi-gelés. Tous ont le regard vide où la joie n’a nulle place, les étincelles de bonheur ont toutes fait place à une servitude sans volonté propre. Les quelques bastions de résistance à l’asservissement total se voient ravagés avec violence par Jormag elle-même dans des souffles de glace impitoyables.

 

Puis, dans ces visions de chaos, une voix s’élève. Tout d’abord lointaine, elle semble se rapprocher, ou en tout cas, elle devient de plus en plus audible. Dans une sorte de lueur grandissante, une silhouette se dessine. C’est la silhouette d’une femme aux ailes déployées derrière son dos, c’est sa voix qui répète un seul et unique mot.

“— Demyan.

Le garçon se réveille en sursaut en entendant son nom.

“— Du calme, Demyan, tout ceci n’était qu’un cauchemar, ça n’est pas arrivé, en tout cas pas encore.

Le jeune homme n’en croit pas ses yeux. Cette femme devant lui lui semble si familière, comme s’il l’avait toujours connue. Mais pourtant, il lui est impossible de la reconnaître avec certitude, ou du moins il se refuse d’y croire un instant.

“— Qui êtes-vous ? Vous n’êtes tout de même pas… la déesse Dwayna ?

La femme lui sourit avec bienveillance et acquiesce humblement.

“— Que suis-je si je ne puis moi-même suivre mes préceptes ? Que suis-je si je laisse ce monde que j’ai tant aimé geler jusqu’en son cœur ? Sache que tu n’es pas seul, Demyan. Bien qu’elle soit à ce jour endormie, mon armée est toujours en vie. Si tu t’en vas la quérir, elle te suivra. Trouve Frisquet dans son repaire, avec ma bénédiction il te soutiendra. Va, Demyan, sois l’espoir de ce monde avant qu’il ne soit trop tard pour lui. Réveille-toi à présent.

 

Et c’est à nouveau en sursaut que Demyan se réveille, pour de bon cette fois.

Le souffle court, incertain d’être réellement réveillé cette fois-ci, son regard finit par se poser sur Miho, assis, qui le regarde avec curiosité. D’une voix laissant entendre un sourire entendu, il s'adresse à lui sans lui laisser le temps de reprendre totalement ses esprits.

“— Toi, on dirait que tes songes ont reçu une visite divine.

Comprenant que ce n’était pas qu’un rêve, Demyan balbutie.

“— Dwayna, elle m’a parlé d’un Frisquet, et d’une armée ?

“— Les bonshommes de neige ? C’est du génie, j’aurais dû y penser !

 

Ni une, ni deux, Miho utilise sa magie jointe à celle de Demyan pour ouvrir un portail où tous deux s’engouffrent. Ils se retrouvent au pied d’une montagne, et devant eux se tient une lourde porte close en pierre couverte de runes. Comme poussé par une volonté inconnue, Demyan tend sa main et vient toucher le centre de cet accès fermé. Soudain, elle se met à vrombir, les runes se mettent à scintiller, et dans un bruit sourd, les battants de l’obstacle s’ouvrent. Les deux personnages pénètrent dans cette grotte qui s’enfonce en profondeur au fil des nombreuses marches qu’ils parcourent. Et puis d’un coup, ils atteignent une vaste caverne où des centaines des bonshommes de neige semblent dormir.

 

 

Miho fait signe au garçon de le suivre et entreprend de se faufiler entre les différents bonshommes de neige, puis finit par s’arrêter devant l’un d’eux en particulier. Il est bien plus imposant que les autres, remarque Demyan, il s’agit certainement du fameux Frisquet dont a parlé Dwayna. À peine quelques secondes plus tard, l’individu semble bouger, comme sortant d’une longue léthargie, il se réveille et observe à tour de rôle les deux curieux personnages qui se trouvent devant lui.

“— Miho ? Où est Dwayna ? Je sens sa présence, où est-elle ?

“— C’est sa bénédiction que tu ressens Frisquet, elle l’a apposé sur ce garçon, Demyan.

Frisquet examine alors du regard le jeune homme, puis Demyan lui explique ce qu’il se passe, les fils de Svanir qui ont volé le cœur d’Hivernel, leur volonté de ramener Jormag à la vie et l’aide dont ils ont désespérément besoin. Il n’en faut pas plus à Frisquet pour accepter de soutenir cet étrange garçon béni par sa déesse. Prestement, il réveille l’ensemble des bonshommes de neige du repaire et entreprend de se mettre en marche, lui et son armée, vers là où Jormag risque de se réveiller à nouveau.

 

Les troupes de Frisquet sont bien trop nombreuses pour qu’il soit possible à Miho et Demyan de les faire passer par un portail de la même manière qu’ils ont atteint leur repaire. Néanmoins, leur magie reste suffisamment puissante pour leur donner assez de force afin de les faire survoler la distance les séparant du camp des fils de Svanir. Même dans ses rêves les plus fous, Demyan n’aurait jamais imaginé voir un jour une armée de bonshommes de neige planer à toute vitesse dans les airs tels des corbeaux se laissant porter par le vent. La scène lui semble hallucinante, mais il reprend rapidement ses esprits quand ils arrivent à destination dans les bois encerclant la clairière assiégée. 

À l’orée du bois, le jeune garçon peut voir que les fils de Svanir se sont tous rassemblés autour du dragon inerte, et que l’un d’eux fait face à tous les autres. Vêtu différemment de ses congénères, il tient entre ses mains ce que Demyan reconnaît être le cœur d’Hivernel. Le rituel a de toute évidence commencé, et il n’y a donc plus de temps à perdre. Pris d’un courage qu’il ne se connaissait pas, Demyan fait connaître sa présence en hurlant de toutes ses forces.

“— Vargundr !

Le chef Svanir fixe subitement du regard le garçon qui a osé interrompre son rituel. Les autres se tournent également vers la voix qui a perturbé la séance sacrée en cours.

 

De leur côté, les bonshommes de neige prennent ce cri pour le signal lançant l’offensive sur l’ennemi. Sans attendre plus longtemps, l’armée de Frisquet se jette à l’assaut des fils de Svanir qui en font de même dans la direction inverse.

La bataille entre les deux forces armées n’a aucun sens. D’un côté, les bonshommes de neige se battent à coup de rafales de boules de neige qu’ils envoient par milliers sur les fils de Svanir, qui, eux, tranchent dans une rage féroce dans ces masses blanches qui les attaquent. Malgré tous leurs efforts, le spectacle s’oriente vers un massacre de l’armée de Frisquet qui s’efface peu à peu face à la brutalité des serviteurs du dragon.

 

 

Observant les événements depuis l’arrière, Demyan assiste impuissant à la décimation de ses alliés fraîchement trouvés, et dans un espoir fou, il se met alors à prier intérieurement, appelant à l’aide dans les tréfonds de son esprit quiconque pourrait entendre son appel.

Les secondes paraissent interminables, mais les implorations du garçon finissent par provoquer un miracle. Comme émues par les suppliques si pures lancées par cette âme en détresse, les forces de la nature s’agitent dans les bois environnants. En une sorte de respiration monumentale, la forêt prend une profonde inspiration, les arbres ploient avec souplesse vers l’extérieur de la clairière. Puis, soudainement, dans une force surnaturelle, la forêt libère son souffle sur la vaste étendue du champ de bataille.

De ses yeux ébahis, Demyan voit les bonshommes de neige se reformer, mais pas seulement. En effet, ces derniers ont l’air plus forts, plus grands, mais surtout bien plus nombreux qu’ils ne l’étaient au départ. Frisquet, se rendant compte que le vent tourne enfin en leur faveur, remotive ses troupes et reprend la bataille de plus belle avec une ferveur nouvelle. Et effectivement, les fils de Svanir se retrouvent ainsi dans la tourmente, surmenés par cette armée loufoque et absurde qui ne cesse de grandir et d’attaquer sans relâche.

Dans cette débâcle saugrenue, le chef Svanir Vargundr Main-de-Givre tente tant bien que mal de poursuivre le rituel qui a été interrompu malgré la bataille faisant rage autour de lui. Les serviteurs du dragon se battent sans merci afin de protéger le bon déroulement de la cérémonie.

 

Malgré l’engouement de l’armée de Frisquet, il reste tout de même un handicap de taille. Les bonshommes de neige ne sont pas faits pour tuer l’ennemi, aucune création de la déesse Dwayna n’aurait cette vocation. Alors, même une fois assommés ou recouverts par des monticules de neige, les fils de Svanir finissent encore et toujours par se relever et reprendre le combat, comme si leur asservissement par Jormag était toujours aussi puissant au point de ne pas leur faire ressentir la moindre fatigue dans cet affrontement, telle une armée de revenants faite de chaire et de glace.

La situation s’enlise, aucun des deux camps ne prend le dessus sur l’autre, aucun des rangs n’avance ou ne recule malgré la volonté commune de vaincre le camp adverse. Ce qui rend la situation assez confortable pour Vargundr Main-de-Givre, qui n’interrompt pas la cérémonie entamée. Des flammes bleues commencent à apparaître et recouvrir le corps de Jormag pendant que le chef Svanir poursuit ses incantations.

 

Demyan est soudain pris d’angoisse. Il voit bien que si les choses n’évoluent pas très vite, l'issue de la bataille sera terrible. Le doute l’envahit à nouveau, et comme dans ses cauchemars, il revoit les images de désolation et d’horreur qui sont sur le point d’arriver face à son incapacité à agir et se battre au côté de l’armée de Frisquet. Il se recroqueville au sol sur lui-même à cause de cette vague d’anxiété.

Miho se rend rapidement compte de la spirale mentale dans laquelle le garçon s’enfonce et réagit rapidement. Il vient alors se coller à lui de la même manière qu’il l’avait fait pour lui transférer ses pouvoirs à leur rencontre. Front contre front, il déverse de puissantes ondes positives dans l’esprit de Demyan qui alors se retrouve rempli de pensées de joie, d’amour et de bienveillance.

Une nouvelle force grandit alors dans le corps du jeune homme. Une douce chaleur prend possession de lui, et elle ne cesse de grandir, comme une puissante énergie sans limite. Il ne s’agit rien de moins que de la magie d’Hivernel poussée à son paroxysme qui se déverse dans le vaisseau catalyseur qu’est devenu Demyan en ce moment-là. Le garçon se met à luire d’un halo qui grandit et s’intensifie à mesure que la magie croît en lui, jusqu’à un certain point où il est devenu impossible de discerner la forme humaine de Demyan qui n’est alors plus que lumière.

Puis, sans s’en rendre compte, il se redresse, se relève et, sans contrôler quoi que ce soit, Demyan laisse s’échapper de lui une puissante explosion de magie sur le champ de bataille. Un enchantement se propage alors comme une vague sur les fils de Svanir. Tous, sans exception, se retrouvent figés, transformés en statues de glace pure dans leurs mouvements. D’un coup, ces dernières explosent et deviennent une multitude infinie de particules scintillantes s’élevant dans les airs.

Demyan, qui a retrouvé sa forme normale, est sous le choc. Il comprend qu’il vient définitivement de renverser le dénouement de l’histoire par une magie dont il ne connaissait pas l’existence quelques instants auparavant.

 

Il ne reste plus que les centaines de bonshommes de neige de Frisquet dans cette clairière où le chaos régnait en maître quelques instants plus tôt. Doucement, le garçon et le renard s’avancent en son centre, se rendant là où se tenait jusqu’à il y a peu Vargundr Main-de-Givre. Au sol, à moitié enfoncé dans la neige, le cœur d’Hivernel est là, comme posé dans un délicat écrin de flocons. Demyan le récupère délicatement et l’observe. Telle une masse de cristal, il reflète les rayons du soleil comme un diamant le ferait sous ses plus beaux atouts. Puis il s’agenouille auprès de Miho et lui tend l’artefact. Avec prudence, le renard vient déposer l’une de ses pattes au contact du cœur, qui disparaît dans une flamme bleue avant de reprendre sa place dans son propriétaire originel. Miho se sent à nouveau complet, et toute sa magie se restaure en lui comme si rien n’avait jamais changé, comme si Hivernel n’avait jamais été en danger.

 

Néanmoins, malgré cette issue favorable, un problème de taille perdure : le corps de Jormag se trouve toujours là, immobile et sans vie dans la neige. Bien que de toute évidence, les fils de Svanir ne font plus partie de ce monde, laisser la dépouille d’un dragon ancestral ici, à la vue de quiconque viendrait s’aventurer en ces terres, est une bien dangereuse idée. Mais que faire face au gigantisme du dragon ?

Et comme si leur inquiétude avait été entendue, un spectacle inattendu se produit. Apparues dans une lumière divine, deux silhouettes sont à présent là. Demyan reconnaît l’une d’elles sans hésitation, Dwayna. La seconde, elle aussi d’apparence divine, s’approche alors de Jormag. Lentement, elle touche le dragon de sa main et, dans un geste délicat, elle vient déposer un doux baiser sur sa peau d’écailles. Le cadavre se transforme alors en une masse de neige qui se recouvre à son tour d’une multitude de fleurs. Doucement, Jormag disparaît pour laisser place à une colline parsemée de mille couleurs grâce aux pétales de ces fleurs de montagne.

 

 

Une fois les deux divinités parties, Demyan réalise qu’il s’agissait de Melandru, la déesse de la nature. Sans voix et sonné par les évènements, il regarde Miho et se met à rire.

 

Remis de ses émotions, Demyan comprend qu’il est temps de voir son chemin se séparer de celui du renard qui l’a emmené dans cette aventure irréelle. Les deux amis se font leurs derniers adieux, non sans émoi. Miho s’éloigne alors. À nouveau en pleine possession de sa magie, il s’élève et virevolte dans le ciel. Son pelage d’argent immaculé reflète les rayons du soleil comme une multitude de cristaux. Telle une étoile, il s’enfonce de plus en plus haut et finit par s'évanouir dans les cieux. Et puis, comme un dernier miracle, une pluie de lumières sous forme de flocons s’abat sur la Tyrie, rendant alors au monde toute la magie d’Hivernel qu’il a failli voir disparaître.

Le cœur débordant de chaleur, Demyan se sent heureux d’avoir pu aider à sauver Hivernel.

Il ressent toutefois une sorte de picotement au creux de sa main. Il regarde sa paume et, surpris, il peut y voir une marque luisante d’empreinte de renard. Certainement un cadeau d’adieu de son ami. Son regard se fixe alors vers le ciel, et il sourit.

Dans son esprit, il peut entendre la voix de Miho lui chuchoter une dernière fois.

 

“— Merci.

 

 

 

Moi, Asheralia, vous souhaite à tous de passer de belles fêtes de fin d'année, en espérant que le conte de cette année aura su réchauffer vos cœurs en ces temps hivernaux.

 

Illustrations : concept arts issus de Guild Wars et Guild Wars 2, images générées par NightCafe.

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